La présence actuellement, de Mars, Saturne et Pluton en Capricorne me donne l’opportunité de proposer ma réflexion sur l’association de ces trois énergies, dont la force et la profondeur ne peut nous laisser indifférents. Cette triple conjonction se reformera d’ailleurs de manière encore plus étroite en mars 2020, avec la présence supplémentaire de Jupiter, qui devrait en amplifier l’intensité. Profitons donc de la conjonction (large) actuelle comme un prélude à la suivante (plus précise) de 2020, et peut-être comme un moyen de l’anticiper.
Il me semble que la formation d’une configuration planétaire conflictuelle (telle que celle de Saturne/Pluton, temporairement associée à Mars), sera d’autant mieux vécue qu’elle se fera en conscience. C’est pourquoi je me propose à l’analyse de l’étendue symbolique de ces trois planètes, que beaucoup d’astrologues pourraient peut-être qualifier (trop unilatéralement?) de pénible, violente, ou dangereuse.
Dans un premier temps, on pourra noter que dans la tradition astrologique, les Anciens avaient pour habitude de qualifier Mars et Saturne (Pluton n’étant pas encore découverte à leur époque) comme « maléfiques ». Aujourd’hui, il m’apparaît que le terme « maléfique » devient de plus en plus délicat à utiliser, puisqu’il se réfère à un jugement de valeur qui risque de cataloguer ces planètes comme définitivement néfastes, en oubliant que tout symbole est duel (et non binaire). Ainsi, parler de planètes « laborieuses » me semble plus approprié, dans le sens où l’énergie de ces trois planètes incite à mobiliser une grande partie de nos ressources psychiques. Mobilisation qui coûtera forcément en effort, tant le travail demandé sera parfois intense.
Quoiqu’il en soit, que ces planètes soient « maléfiques » ou « laborieuses », nous pouvons nous assurer d’une chose, c’est qu’elles n’inclinent pas au repos. Elle participeront au contraire activement à mobiliser notre énergie pour ratisser, creuser, disséquer toute l’étendue de notre âme. Ce qui pourra effectivement se faire avec une certaine dose de violence, si le lien avec nous même venait à ne pas se faire.
Ensuite, et selon les qualités élémentales établies par Ptolémée, ces trois planètes ont une qualité commune sèche très marquée (rappelons que Ptolémée, à la suite d’Hippocrate, opère une classification des planètes selon les critères chaud, froid, sec et humide).
En astrologie, le sec est un processus d’analyse, de séparation, d’individualisation, de contraction et de repli sur le détail ou sur soi. Il se déroule dans une atmosphère rigide et cassante, allant aux extrêmes. Les actions soutenues par ces trois planètes seront donc cinglantes, froides, sans concession et sans état d’âme. Dans le meilleur des cas, il y a du discernement, et une introspection profonde des situations critiques. Dans le pire des cas, la violence risque de prédominer et les actions se feront dans une agressivité froide et calculée. Et dans tous les cas, l’obsession a de fortes chances d’être de la partie, car avec Pluton, tant que le travail de Saturne n’est pas abouti, il y a rumination et ressassement. Et cela peut durer longtemps…
Dans un second temps, et afin d’appréhender au mieux la conjonction de Saturne et Pluton à venir, il faut peut-être brièvement se remettre en mémoire les énergies qui se sont déployées dans le monde ces dix dernières années. Notamment celles véhiculées par Uranus et Pluton.
D’abord, depuis 2008, et l’entrée de Pluton dans le signe du Capricorne, nous sentons nos systèmes de pensée se fissurer (dont la crise financière n’en a été que l’aspect le plus saillant).
Ensuite, un vif besoin de renouveau, sur fond de révoltes, s’est fait d’autant plus pressant en 2011 avec l’entrée d’Uranus en Bélier (les révolutions arabes n’en représentaient certainement que le haut de l’iceberg). Enfin, le carré Uranus/Pluton de 2011 à 2016 a semé les dissensions et les discordes sur fond de tensions grandissantes entre les nations, les communautés, et les idéaux. Dans le même temps, devant la crispation violente des systèmes anciens à vouloir se maintenir, les clivages sociaux se sont agrandis, la polarisation des idées renforcée, et le repli sur soi accentué (refus systématique des pensées dominantes, montées des extrémismes de tous bords, pertes de confiance entre les peuples…).
Ainsi, parce qu’Uranus en Bélier et Pluton en Capricorne nous incitent à faire table rase sur le passé pour laisser un nouvel espace au futur, il est encore difficile aujourd’hui de nous projeter positivement dans un monde désirable. Et à première vue, il semblerait que le passé fasse encore cruellement irruption dans le présent, en nous bouchant une vision sereine de l’avenir.
Et pourtant.
Pourtant, force est de constater que les prises de conscience naissent partout. Partout l’inconfort des anciens systèmes de pensées poussent les êtres humains à inventer de nouvelles façon de coopérer, à investir de nouveaux canaux d’échanges, et à créer de nouveaux outils de respect de l’homme et de la nature. Ainsi, si nous nous permettons de lâcher deux minutes nos peurs, il semblerait que nous puissions effectivement apercevoir les balbutiements d’un monde nouveau. Et même si l’entrée de Saturne en Capricorne (et sa rencontre prochaine de Pluton) peut faire crisser des dents de nombreux astrologues, on peut également se laisser à penser qu’elles pourront aussi nous aider à renoncer (Saturne) pour mieux discerner (Pluton).
Renoncer aux scories du passé, qui sont encore largement dominées par la peur de l’autre et le pouvoir sur l’autre. Afin de passer d’un système à un autre. D’un système vertical, basé sur la hiérarchie et la domination (valeurs capricorniennes à abandonner), à un système horizontal, basé sur la coopération et l’humain (valeurs du Verseau qui se dressent à l’horizon, avec l’entrée de Pluton dans ce signe en 2024).
Discerner dans ce passé de ce qui doit être définitivement laissé derrière nous, et de ce qui doit être gardé, afin de consolider les bases de notre futur. Car détruire le passé pour se projeter corps et âmes dans un futur sans fondement serait tout aussi absurde que refuser le futur pour se réfugier dans un passé révolu. Le lien entre passé et futur doit être maintenu, et c’est justement cette période de transition (très inconfortable mais aussi passionnante) que nous vivons.
Ainsi, alors que le carré Uranus/Pluton aura semé le trouble nécessaire au réveil de nombreuses consciences (ainsi qu’à l’éclatement de plusieurs autres), on peut imaginer que la présence de Saturne en Capricorne, et plus précisément sa rencontre avec Pluton, nous invite à une profonde plongée dans le vif du sujet, afin de s’attaquer véritablement aux maux qui rongent notre époque.
Et on peut assez facilement sentir que la période à venir ne risque pas de se faire dans la légèreté et le plaisir de vivre…
Car avec Saturne et Pluton dans le signe des limitations, cette conjonction ne se fera évidemment pas sans dépouillement et renoncement.
Les restrictions, les pénuries, les luttes (notamment celles contre le pouvoir) pourront par exemple être l’expression des énergies véhiculées par Saturne, Pluton (et Mars) en Capricorne.
Mais ce climat, très austère, pourra aussi être le décor de chantiers prometteurs du moment que ceux-ci pourront se faire dans le temps, le calme, la sincérité, et le discernement (valeurs capricorniennes).
Ainsi, tant que Saturne sera en Capricorne (durant deux ans et demi), la période ne risque pas d’être celle des innovations soudaines de type startups, mais plutôt celle des projets ambitieux qui s’inscrivent dans le temps, dans un processus de lente maturation…
Mais soyons en certains, que cette conjonction soit douloureuse et/ou salvatrice, elle pourra de toute façon servir de terreau fertile au monde qui suivra.
Voyons maintenant comment le signe du Capricorne s’inscrit dans ce que nous créons de nos vies, dans les systèmes et croyances que nous érigeons, et comment Saturne et Pluton peuvent contraindre ces schémas de pensées.
En effet, dans nos vies, nous nous affilions tous à des valeurs, qui nous renvoient à une morale, et qui elle-même nous aident à nous situer dans le maelström très subjectif du bien et du mal. Ces valeurs et cette morale, que symbolise le signe du Capricorne, sont par ailleurs immanquablement liées aux images que nous nous faisons de notre monde, et donc à l’ensemble de nos croyances. Ainsi, ces croyances sembleraient nous indiquer la direction que nous nous sommes fixée, telle l’aiguille d’une boussole.
Tout cela relève du signe du Capricorne, et ce sont bien ces croyances que la conjonction Saturne/Pluton viendra remettre en question, en y semant un doute profond.
Ces deux planètes viennent interroger ce qui nous semblait comme définitivement acquis. Elles viennent remettre en question le fondement même de nos sociétés.
Ainsi, en ces temps de défiance et de grand doute envers le pouvoir, Saturne et Pluton en Capricorne risquent fort de nous confronter aux systèmes, aux vérités, et aux lois que nous nous sommes construits, en nous en rappelant les limites : celles de l’incarnation et du temps.
En ce bas monde, ces deux planètes nous suggèreraient qu’il n’existe pas de Vérité unique et intangible, mais plutôt plusieurs points de vue sur une même réalité. Pluton joue sur l’ambivalence des choses, et ne peut se satisfaire d’un monde binaire. Depuis son entrée en Capricorne en 2008, il ne cesse de nous le rappeler. Et c’est en résistant, en s’agrippant aux vieilles habitudes, que nous nous faisons du mal, et que les mouvements violents trouvent les opportunités de (re)naître. Voilà donc tout l’enjeu de cette conjonction; trouverons nous la force nécessaire pour nous approfondir ? ou succomberons nous à cette violence qui refuse l’introspection ?
Aussi, le problème de nos sociétés actuelles n’est pas, à mon sens, les croyances en tant que telles, mais plutôt la pensée erronée que sa propre croyance devrait être celle de tous. Comme si on oubliait constamment que la réalité n’est pas une image que l’on contemple d’un seul angle, mais plutôt un diamant à multiple facettes.
Les multiples croyances qui jalonnent le monde seraient, dans mon exemple, les multiples facettes de ce diamant, et participeraient ainsi à sa beauté.
Les croyances sont présentes partout chez l’Homme. Même chez l’athée qui croit les refuser (ne pas croire en l’existence de Dieu est, quoique l’on puisse en penser, encore une croyance). Même chez le plus pur des matérialiste (penser que la matière est à l’origine de tout, notamment de l’esprit, est aussi encore et encore une croyance). Croire est donc un besoin inné chez l’Homme, qui le pousse à donner du sens à son monde, et l’incite à y pénétrer avec confiance.
Mais ne nous y trompons pas, les croyances sont ambivalentes. D’un côté, elles semblent aider les hommes à se forger un monde cohérent et viable, dans lequel ils peuvent poursuivre l’expérimentation d’eux-même. Pendant que de l’autre, elles les contraignent à se cantonner à elles, avec pour terrible conséquence, celle de ne plus se dépasser, et de ne plus progresser.
C’est de cette manière que la conjonction Saturne/Pluton en Capricorne risquent de mettre en relief toutes les contradictions que peuvent renfermer nos croyances. A chacun de nous d’y répondre avec le plus responsabilité et d’honnêteté possible.
Pour conclure simplement, je pourrais résumer ma vision des énergies capricorniennes actuelles (et à venir) à l’aide de deux mots : restriction et construction. Deux mots que nous pourrions d’ailleurs mettre en regard des précédentes conjonctions de Saturne et Pluton. L’une en 1982 (en Balance), dont les mots qui me viennent à l’esprit sont transgression et réparation. Et l’autre en 1947 (en Lion), avec les mots pugnacité et affirmation. Ainsi, on pourra établir des liens entre ces six mots (que ce soit à un niveau personnel ou collectif), afin de retracer l'évolution symbolique de ces deux planètes.
Pour qu’au final, elles nous enseignent que quelque soient les non-dits et les tabous qu’elles véhiculent, le temps (Saturne) finit toujours pas révéler (Pluton) ce que nous sommes. Ce sera alors sans doute le rôle essentiel d’une telle conjonction : nettoyer de fond en comble les consciences.
Et bien que le risque y soit de déchanter, ou de sombrer dans le cynisme pur, il faudra reconnaître à ces énergies saturniennes et plutoniennes un immense bénéfice : celui de gravir un seuil vers plus de lucidité.
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